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Said Sadi fustige «l’homme du système», Gaid Salah, et lui demande de partir

l’ancien président du RCD, Said Sadi a adressé, ce jeudi 11 avril, un lettre ouverte au chef d’état-major de l’armée nationale, Ahmed Gaid Salah dans laquelle il l’appelle à partir « pour laisser la place au nouvelles générations ».

 
En ces moments décisifs pour la patrie, chaque Algérien est mis face à ses responsabilités. Vous tout particulièrement. Il est temps de partir. Parce que vous êtes âgé, parce que le système que vous avez soutenu a échoué et, surtout, parce qu’il est condamné par l’exceptionnelle mobilisation citoyenne qui fait renaître la nation depuis le 22 février.
Continuer de proclamer que l’armée est en phase avec le peuple qui exige un nouvel Etat à la mesure de ses espérances, de ses droits et de sa démographie renouvelée peut être louable. Mais faire le contraire de ce qui est martelé depuis maintenant un mois et demi ne peut pas convaincre grand monde ni, d’ailleurs, arrêter la dynamique qui a rendu à nos concitoyens civisme et espoir.
Depuis le début de ce mouvement, votre discours a beaucoup varié. Vous fûtes un partisan du cinquième mandat. Vous avez accusé les manifestants d’être manipulés en vue de déstabiliser leur pays pour, enfin, admettre, formellement, que le peuple avait raison, quitte à donner une interprétation opposée à ses revendications. Tout en alternant menaces et promesses à l’encontre de nos compatriotes, vous avez assuré, hier à partir d’Oran, que des dossiers de corruption seront traités sans complaisance. Vous avez également décrété que la solution à la demande de changement radical est dans le parlement, instrument d’une gestion anachronique qui a pillé l’Algérie et décrédibilisé l’Etat.
Pour imposer ces décisions qui, d’ailleurs, ne relèvent pas de vos compétences – vous êtes vice-ministre de la défense – vos laudateurs, qui se retourneront contre vous sitôt que d’autres vents souffleront, expliquent qu’il faut éviter l’effondrement de l’Etat. L’Etat algérien a tenu dans des périodes critiques où le pouvoir politique a démissionné ou, plus grave, s’est laissé tenté par des alliances douteuses voire des compromissions périlleuses pour l’Etat national. C’est le dévouement de centaines de milliers d’agents de l’Etat, du plus haut niveau à l’échelon le plus modeste – restés sous le harnais dans les tempêtes provoquées par l’incurie des dirigeants – qui ont préservé la cohésion et la stabilité de l’administration nationale.
Je n’insisterai pas sur le respect de la constitution convoquée selon les circonstances. D’autres avant moi ont, à juste titre, rappelé, comment et combien de fois la loi fondamentale a été charcutée ou carrément violée. Il n’est, en conséquence, pas judicieux de se référer à cet artifice pour justifier l’injustifiable qui se prépare et dont les premiers signes sont des plus préoccupants.
Continuer d’ignorer le sens profond d’un mouvement déjà inscrit dans l’Histoire du monde, et ceci quelle que soit son issue immédiate, c’est prendre le risque personnel de rester comme l’un des sombres repères de notre mémoire et, plus grave, d’entraîner l’armée dans une aventure où elle connaîtra la pire des épreuves : affronter ses
concitoyens. En outre, l’ancien maquisard que vous êtes sait que nul n’a gagné contre un peuple qui se lève.
Général Ahmed Gaïd Salah,
L’Algérie asservie, étouffée, humiliée et pillée revient de loin. Elle a su retrouver vigueur, honneur et dignité à travers un mouvement miraculeux inspiré et animé essentiellement par une jeunesse à laquelle, pourtant, on n’avait laissé aucune chance.
Tout appelle à votre retrait. Le poids des ans comme l’époque que nous vivons invitent à la sagesse, au courage et à la lucidité.
Il est temps de laisser la place aux nouvelles générations. L’époque des dictats militaristes est révolue. Ce serait une faute de jugement grave de ne pas comprendre qu’aujourd’hui, en Algérie aussi, le cri d’un citoyen est plus audible que le bruit d’un canon.
Général Ahmed Gaïd Salah,
La question n’est pas de savoir si vous devez partir mais comment et quand cela va advenir.
Ce n’est pas en recourant aux règlements de comptes que l’on va redonner confiance aux citoyens et crédibilité aux institutions; surtout quand les investigations ciblent certains acteurs et épargnent d’autres. La justice à la carte est l’une des facettes les plus insupportables de l’injustice. Il faudra bien sûr récupérer le maximum de ce qui a été
détourné dans le cadre d’un Etat de droit qui reste à construire. Pour l’heure, prendre de vraies mesures conservatoires suffit à enrayer les fuites de capitaux. Les préjudices sont, nous le savons tous, immenses. Mais l’Algérie est d’abord riche de ses fabuleux enfants. Ce qui se passe actuellement en Algérie est un événement planétaire. Vous devez voir que des horizons inédits, par ailleurs inéluctables, se dessinent pour le pays.
Comme toute entreprise humaine, surtout quand elle s’est accomplie dans un système opaque et violent, votre parcours a connu des fortunes diverses. Vous avez une occasion unique de clore votre carrière par une décision patriotique qui pourrait transcender ou, du moins, relativiser ses points de faiblesses: faire rentrer l’armée dans les casernes et laisser l’Algérien inventer le grand destin que le militarisme lui a interdit depuis le premier jour de son indépendance.

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