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Procès d’Ouyahia, Sellal, Yousfi, Bedda et des hommes d’affaires : Les accusés chargent Bouchouareb

Le procès des anciens premiers ministres, des ministres et des hommes d’affaires, concernant l’industrie automobile, commence enfin au tribunal de Sidi M’hamed d’Alger. Après un report de 48heures, en raison de la pagaille générale qui s’est produite lundi dernier, le juge a ouvert la séance, dans des conditions particulières, par l’audition des accusés, dont les deux ex-premiers ministres, en l’occurrence Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal. Récit d’une journée judiciaire inédite.
Tribunal de Sidi M'hamed à Alger
© DR | Tribunal de Sidi M'hamed à Alger

Qualifié par certains de « procès du siècle » et par d’autres « de parodie », l’audience a commencé, vers 10 heures du matin, dans un tribunal archi-comble. Auparavant, des journalistes venus couvrir l’évènement ont butté sur des restrictions inhabituelles à l’entrée où des agents de police exigeaient la présentation d’un badge pour l’accès à la salle d’audience. Ils n’ont été autorisés à entrer dans le hall du tribunal qu’après plusieurs minutes de contestation.

Le nom de deux personnes revient souvent dans ce dossier. Il s’agit de Abdeslam Bouchouareb, ministre de l’industrie et des mines au moment de la réforme du marché automobile, actuellement en fuite, et l’ancien patron du groupe Elsecom, Abderrahmane Achaibou, homme d’affaire qui a dénoncé les pressions exercées par Bouchouareb, qui avait « refusé de lui attribuer la licence d’exploitation ».

Le premier à être appelé à la barre est Ahmed Ouyahia. Vêtu d’un manteau noir, comme on le constate sur des images prises sur l’écran mis en place dans le hall du tribunal, celui qui a été chef du gouvernement et premier ministre à plusieurs reprises, a tenté de contre-attaquer d’entrée. Il remet en cause la procédure judiciaire.

En réponse aux questions du président du tribunal qui l’interroge sur les motifs du choix de certains opérateurs, en particulier dans l’affaire du montage de véhicules, l’ex-SG du RND invoque l’article 177 de la Constitution. Il demande, à cet effet, l’application de cette disposition constitutionnelle stipulant « l’institution d’une haute Cour de l’Etat pour connaître des actes pouvant êtres qualifiés de haute trahison du président de la République, des crimes et délits du Premier ministre, commis dans l’exercice de leur fonction ».

Mais cette demande a été rejetée par le procureur de la République. Ensuite, le juge reprend l’interrogatoire en questionnant l’ex-premier ministre sur les faits qui lui sont reprochés.

Ouyahia : « Je n’ai fait dans le népotisme »

En réponse, Ahmed Ouyahia nie tout. Il affirme qu’il « n’a pas recouru au népotisme » dans le dossier du montage de véhicules et qu’« il n’a pas violé la loi ». « Les avantages ont été octroyés   conformément à la loi », déclare-t-il au juge, rejetant ainsi la charge « d’abus de fonction ».  

«Les avantages ont été octroyés, dans le cadre de l’affaire du montage des véhicules, conformément à loi relative à la promotion de  l’investissement », lance-t-il. Il soutient, dans ce sens, « avoir appliqué la politique du Gouvernement en matière de promotion de l’investissement et de création de postes d’emploi ».  

D’un autre côté, l’ex-premier ministre répond au juge, qui lui a demandé pour quelle raison il a « violé la loi en donnant des instructions aux douanes et aux services de l’industrie », par cette affirmation « Oui je n’ai pas attendu le décret présidentiel pour demander aux douanes et aux services du ministère du commerce pour débloquer les marchandises liées à l’industrie automobile car les concessionnaires allaient baisser le rideau si l’on avait attendu six mois, le temps nécessaire pour la promulgation du décret ».

Ahmed Ouyahia précise également que « ce qui s’est passé en 2017 ne relève pas de ses responsabilités ». « Lorsque j’ai pris le gouvernement, j’ai trouvé des usines en activité », argue-t-il.

L’accusé soutient aussi qu’en 2014, la facture d’importation des véhicules a atteint les 6 milliards de dollars par ans. « C’est pourquoi nous avons choisi de garder uniquement 7 importateurs, car le nombre aurait pu atteindre les 40 importateurs et on aurait vidé le trésor public », dit-il.

Interrogé sur ses comptes bancaires qui ont connu des mouvements de 300 milliards de centimes en trois ans, Ahmed Ouyahia rétorque par « J’ai un compte au niveau du CPA de 30 000 DA. Le second est au niveau de la BDL. Je ne l’ai pas déclaré car l’argent n’a aucun lien avec ma fonction », précise-t-il, affirmant « qu’il a transféré de l’argent à son fils pour l’aider dans son projet ». « Je ne suis pas idiot pour ouvrir un compte bancaire dans une banque publique pour faire du blanchiment d’argent », ajoute-t-il. Ahmed Ouyahia a fait un malaise, mais il avait refusé de se faire soigner par un médecin.

Sellal : « le cahier des charges est fait par Bouchouareb »

Poursuivant, le juge appelle Sellal. Vêtu lui aussi d’un manteau noir, glissé dans un costume gris, une chemise bleue sans cravate comme nous avions l’habitude de le voir et des chausses noires, l’ex-chef de gouvernement est interrogé sur le cahier des charges concernant l’industrie automobile. « Ce cahier a été élaboré par Abdesslam Bouchouareb, alors ministre de l’industrie. Lorsque nous l’avons vu, nous lui avons demandé verbalement d’en élaborer un autre », affirme-t-il.

Le juge l’interroge également sur le financement de la campagne du président Bouteflika et les 39 milliards déposés au niveau de la direction de campagne par l’homme d’affaires Mazouz. Il nie tout lien avec la gestion des finances de la campagne et que seul le candidat et son frère cadet, Saïd Bouteflika, sont responsables de cette question. « Je n’ai rencontré aucun des bailleurs de fonds », assure-t-il.

Abdelmalek Sellal ajoute aussi que « lorsqu’il a pris le gouvernement, il a constaté qu’il y avait un jeu malsain concernant la distribution du foncier industriel et qu’il avait ordonné l’arrêt de l’opération ».

Youcef Yousfi, ancien ministre de l’industrie, charge, lui aussi, Abdesslam Bouchouareb. « Lorsque je suis arrivé au ministère, j’ai trouvé de nombreux dysfonctionnements. J’ai essayé de changer les choses, mais je n’ai pas pu. L’entière responsabilité dans l’élaboration du cahier des charges est assumée par Abdesslam Bouchouareb », explique-t-il.

Quatrième à comparaitre devant le juge, l’ancien ministre de l’Industrie, qui n’est resté à la tête de ce département que deux mois, Mahdjoub Bedda affirme aussi que le dossier concernant le montage automobile a été élaboré par Abdesslam Bouchouareb. « J’ai procédé au retrait des licences d’importation des véhicules en application de l’article 11 du décret exécutif concernant ce volet », justifie-t-il.

De son côté, Abdelghani Zaâlane a été interrogé sur sa gestion de la direction de campagne du 5ème mandat avorté. « L’argent versé à la direction de campagne s’élève à 75 milliards de centimes. Je n’ai pas ouvert deux comptes bancaires pour recevoir cet argent », dit-il, niant aussi son rôle dans la gestion des finances de la campagne.

A noter qu’à l’ouverture du dossier, le juge avait indiqué que « trois dossiers ont été fusionnés en un ». Cette décision a suscité la colère du collectif de la défense qui estime que « l’élément matériel pour le déroulement du procès n’est pas établi ». Le procès se poursuit toujours au niveau du tribunal.

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