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Phénomène de la « harga » : « le discours politique ne passe plus chez les jeunes »

Lors de Forum national sur le phénomène des « Harraga » organisé par le ministère de l’intérieur, les intervenants ont remis en question le rôle des partis politiques «qui sont seulement attirés par le pouvoir », et d’attirer l’attention des autorités sur l’urgence « d’agir si l’on veut sauver notre jeunesse d’une mort inévitable»

 
Tenant pour responsables le manque d’engagement de l’Etat dans la lutte contre l’émigration clandestine, les participants de cet atelier dédié exclusivement à la sensibilisation des jeunes sur le phénomène, ont mis le doigt sur le mal qui ronge la jeunesse.
Loin d’un discours xyloglotte, un haut cadre du ministère de la communication affirme l’existence des lacunes en communication dont souffrent la quasi-majorité des institutions. «La communication n’est efficace que lorsque son contenu correspond au réel. Le savoir communiquer est vraiment la grande lacune. L’opportunisme en communication est très mauvais surtout venant d’un responsable.
C’est pourquoi le discours politique n’est plus crédible et parfois plus audible.», regrette-t-il. Il prône par ailleurs, l’engagement des professionnels en la matière en maitrisant les éléments de langage qui devront être partagés. «Une stratégie de communication est une aubaine pour donner corps à une approche partagée qui soit unique».
De son côté, le sociologue du CREAD Mohamed Saïb Musette, révèle le mal qui ronge ces jeunes dont l’unique objectif est d’avoir une vie meilleure quand même chimérique. «Les jeunes ne prennent pas le large pour se suicider. Car il faut savoir qu’un suicidaire a une certaine pathologie dont les symptômes sont reconnus. Ces jeunes ne souffrent absolument de rien mais d’un dégout profond qui nait du manque de perspectives, des obstacles et du vide total dans lequel ils surnagent», souligne-t-il.
Allant plus loin dans son argumentaire, le sociologue identifie les raisons qui incitent ces jeunes à prendre des risques au péril de leur vie. « C’est ce sentiment d’inutilité, de mépris, et de désespoir qui leur donne cette envie de fuir leur pays. Quand ils pensent que toutes les portes sont fermées, personne ne pourra les convaincre à rester. La patience pour eux est synonyme de perte de temps», explique le Pr Musette.

Discours politique inopérant

S’agissant du rôle de l’Etat dans le phénomène d’émigration clandestine, le sociologue soutient l’argument des autres intervenants. Le discours politique ne passe plus, «car on n’est plus dans un état d’esprit nationaliste étroit. Et les discours politiques n’intéressent plus les jeunes algériens. Ces derniers veulent exprimer eux-mêmes leurs préoccupations. C’est-à-dire ils veulent être acteurs de leur destin. Hélas, jusqu’à présent, la société d’adultes en Algérie considère ces jeunes comme des assistés qu’on a besoin de moraliser», révèle-t-il.
Par ailleurs, le chercheur du CREAD évoque la problématique de l’engagement du jeune comme un acteur clé de la société. «Le jour où on reconnaitra que le jeune est un acteur de la société, qui peut prendre son destin en main, qu’on l’invite à donner son point de vue partout au niveau du quartier, au niveau de la commune, de la wilaya… c’est à ce moment-là que les grands problèmes des jeunes en Algérie pourront être résolus.», insiste-t-il et d’ajouter «pourquoi on n’implique pas les jeunes dans la vie politique comme cela se passe dans les autre pays. Ils sont ignorés et personne ne les écoute. Il faut qu’on apprenne à écouter les jeunes et comprendre le fond de leur discours.»

Le politique, l’abonné absent

Mais quel est rôle du politique ? Que font les partis politiques ? Sont-ils présents ? Que pensent-ils de ce phénomène ? Eh bien que nenni ! «Ces partis sont seulement attirés par le pouvoir. Les problèmes sociaux ne sont pas une préoccupation majeure pour eux. Donc le politique ne s’intéresse pas du tout au social. Ces partis-là dans leur majeure partie n’ont ni de plans ni de propositions pour essayer de résoudre ce problème», déplore l’expert.
Il est vrai qu’il était temps de briser le tabou, mais selon les intervenants, la question doit être étudiée en profondeur et que toutes les dimensions de la problématique doivent être aussi prises en compte. Les experts et les chercheurs prenant part à cet évènement, ont soutenu la stratégie du renouveau politique de d’émigration internationale, la politique de la jeunesse ainsi que la politique de l’emploi. «Il existe un problème de fond dans notre politique culturelle. Elle n’offre malheureusement rien à la jeunesse. Idem pour la politique de l’emploi. Le jeune algérien est le souffre-douleur de son Etat», regrette une enseignante universitaire.

Politique d’émigration à revoir

Quant à la politique d’émigration, le Pr Musette a son mot à dire. Pour lui, cette politique connaît, elle aussi, des défaillances. «On n’organise pas la mobilité, et la migration non plus. Si l’on veut réellement aller en profondeur, il faut aussi taper à la politique actuelle de migration, la politique de l’emploi ainsi que la politique culturelle.
Pour lutter contre ce phénomène il faut avoir un plan d’action global. Il y a un énorme vide culturel en Algérie», préconise-t-il en rappelant qu’en 2007 le ministère de l’intérieur avait lancé le projet national de la jeunesse, mais jusqu’à maintenant, il n’y a rien de concret. «Aujourd’hui, c’est le corps social qui est touché. Ce n’est plus un problème de jeunes, c’est devenu un problème sociétal. C’est toute la société qui se trouve verrouillée, bloquée et enfermée en Algérie. Très peu de possibilité de mobilité internationale. Très peu de perspectives d’évolution pour les jeunes. Il est temps d’agir si l’on veut sauver notre jeunesse d’une mort inévitable», Conclut Le Pr Musette.

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