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Les zones d’ombres du « procès du siècle »

Le tribunal de Sidi M'hamed a été le théâtre du procès qui restera dans les annales de la justice Algérienne. Deux premiers ministres, très influents durant leurs mandats, plusieurs membres du gouvernement ainsi que des hommes d'affaires ont été poursuivis pour des faits très graves, liés à l'industrie automobile et au financement de la campagne électorale du président poussé à la sortie, Abdelaziz Bouteflika. Mais plusieurs zones d'ombre ont été révélées par la défense qui a d'ailleurs décidé de boycotter les plaidoiries jusqu'au dernier jour du procès.
© DR | les deux anciens chefs du gouvernement, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal
© DR | Ahmed Ouyahia et Abdelmalek sellal

Alors que les avocats ont dénoncé, au départ, « le manque de conditions pour un procès équitable », le procès qui a été reporté du 2 décembre au 4 décembre a débuté sans le collectif des avocats. Ces derniers ont également annoncé que « le tribunal de Sidi M’hamed est incompétent pour juger les deux anciens premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal » qui devaient, selon la constitution, « être jugés par la haute cour d’Etat » précisent les avocats.

Quand le procès a commencé, les prévenus « Guest Star » ont défilé les uns derrière les autres pour répondre aux questions du juge qui maîtrisait tous les volets du dossier. Les deux anciens premiers ministres se sont défendus comme il le pouvaient, sans leurs avocats, avant que l’ancien patron du Forum des Chefs d’Entreprises (FCE), Ali Haddad, ne soit appelé à la barre.

« Sous les ordres de Said Bouteflika« 

L’ancien homme fort au temps de Bouteflika n’a pas hésité à répondre aux questions du juge qui l’a interrogé sur le financement de la campagne pour le 5e mandat de Abdelaziz Bouteflika. « Oui, j’ai effectivement demandé à mon chauffeur d’aller chercher 190 millions de dinars (19 milliards) du siège de a campagne, sis à Hydra, pour les déposer au siège de notre société ETRHB, sis à Dar El Beida » répond Haddad qui n’a pas tardé à lâcher que cela a été « fait sous les ordres de Said Bouteflika ». Cette version a été confirmée par un salarié de l’ETRHB qui a transporté cette somme d’argent.

À la surprise de tous les présents dans la salle, le juge a levé la séance jusqu’à ce que Said Bouteflika soit introduit comme témoin. Les mesures de sécurité autour du tribunal Sidi M’hamed et à l’intérieur ont été renforcées, voire doublées. Personne ne rentre et personne ne sort. À l’intérieur de la salle, il n’y avait que les services de sécurité et quelques journalistes.

Il a fallu deux heures de temps avant que Said Bouteflika n’accède dans la salle. Menotté, quatre gendarmes l’entourent. L’ancien conseiller de Abdelaziz, son frère, a gardé son sourire. « Je ne répondrais à aucune question » a-t-il répondu au juge qui a demandé à l’entendre en tant que témoin dans le financement de la campagne de Abdelaziz Bouteflika.

Pourquoi Said Bouteflika n’est pas poursuivi?

Ali Haddad, ancien Patron du FCE et très proche de la famille de l’ancien président, a révélé des faits très graves, au delà des 190 millions de dinars. « Il ma contacté et ma demandé de contacter Abdelmalek Sellal et Amara Benyounes et quelques autres personnalités politiques afin qu’ils soient dans la direction de campagne de Abdelaziz » a précisé Ali Haddah sans cacher sa proximité avec Said avec qui il était en contact permanent.

Plusieurs avocats qui ont suivi le procès se demandent aujourd’hui, notamment après la prononciation du verdict, « pourquoi Said Bouteflika n’est pas poursuivi par le parquet pour détournement de fonds et trafic d’influence au moins ?« , s’interrogent-ils dans le hall du tribunal. « Aujourd’hui, Said n’est qu’un témoin. Normalement, à partir du moment ou plusieurs témoins ont confirmé son implication, le parquet devrait le poursuivre immédiatement ou diligenter l’ouverture d’une enquête ».

Abdelghani Zaalane, désigné directeur de campagne électorale du candidat Abdelaziz Bouteflika pour l’élection présidentielle du 18 avril 2019, en remplacement de Abdelmalek Sellal, a occupé auparavant plusieurs hautes fonctions dont celle de ministre des Travaux publics et des Transports, a aussi révélé des faits très graves. Il a cité, dans le détail, les noms des personnes qui ont financé la campagne de Bouteflika.

« C’est un dossier politique »

Au total, 750 millions de dinars ont été collectés par la direction de campagne, soit 75 milliards de centimes. Mais le juge d’instruction en charge du dossier n’a pas convoqué les hommes d’affaires cités par Abdelghani Zaalane. La question qui reste sans réponse est pourquoi certains ont été convoqués et d’autres non?

En tous cas, le procès « historique » lié au trafic dans l’industrie automobile et le financement de la campagne, où sont cités des dizaines de personnes, n’a duré que trois jours. Le bâtonnat a annoncé, au premier jour du procès, que « c’est un dossier politique et le seul objectif, c’est de condamner les inculpés avant la présidentielle pour dire aux algériens, allez aux urnes car les anciens corrompus sont mis en prison« , tout en précisant que « dans le dossier, plusieurs irrégularités ont été constatées« .

Pour rappel, les deux anciens Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, poursuivis dans des affaires de corruption et d’abus de pouvoir, notamment dans l’affaire du montage automobile, ont été condamnés ce mardi à 15 et 12 ans de prison ferme par le tribunal de Sidi M’hamed à Alger.

Les hommes d’affaires ont bénéficié de peines plus légères. Ali Haddad, quant à lui, est condamné à 7 ans de prison ferme. Pour ce qui est de Hassan Larbaoui, celui-ci est condamné à six ans de prison ferme. Mohamed Bairi est condamné à trois ans de prison ferme.

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