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Il y’a une année, Bouteflika poussé à la démission par le peuple

© INTERLIGNES | Manifestation devant la grande poste à Alger
© INTERLIGNES | Manifestation devant la grande poste à Alger

Il y’a un an jour pour jour, le règne de la famille Bouteflika prend fin. Abdelaziz a renoncé au cinquième mandat, qu’il a brigué, grâce à la pression de la rue. Des millions d’algériens sont sortis dans toutes les régions du pays dans une mobilisation sans précédent dans l’histoire de la jeune république depuis son indépendance. C’est la première victoire du Hirak, qui pourtant, décide de ne pas en rester-là.

En fin 2018, le président sortant a mobilisé ses troupes afin d’essayer d’imposer la prorogation du 4e mandat appelé à l’époque un 4e mandat bis ! L’opposition, furieuse contre cette tentative de « prise d’otage » dénonçait à l’époque un « acte anti-constitutionnel ». Malgré l’insistance de tous les « hommes forts » de Bouteflika et les manoeuvres de Said, « le compromis » a été avorté et le mandat Abdelaziz Bouteflika était obligé de se présenter au 5e mandat s’il voulait rester au pouvoir qu’il détenait depuis 20 ans déjà.

Le 18 janvier 2019, le président Abdelaziz Bouteflika avait convoqué le corps électoral pour le 18 avril. C’est là que son souhait de briguer un cinquième mandat se confirmait. C’est à ce moment-là que les appels à sortir manifester contre cette « énième violation de la constitution » se multipliaient sur la toile.

Habitué à ce que le peuple s’assoie à ses plans, et convaincu que ce cinquième terme d’office passera. Le cercle restreint du président le présenta comme candidat à la présidentielle du 18 avril, le 10 février 2019.

Avant même qu’un mois passe sur cette annonce rejetée massivement par la population et les partis de l’opposition, une première manifestation éclate à Chlef. Personne ne s’attendait à une manifestation dans cette wilaya, qui d’habitude ne manifeste jamais.

Quatre jours plus tard, le 16 février 2019, l’Algérie a connu sa première grande mobilisation populaire contre le cinquième mandat. C’est à Kheratta (Béjaia), que des dizaines de milliers de manifestants ont envahi les rues et exprimé leur colère suite à cette annonce.

Après quelques discours des officiels de l’époque, notamment du premier ministre Ahmed Ouyahia qui a déclaré que le gouvernement « maitrise la rue », la population commençait à fulminer et les appels se sont donc multipliés pour une grande manifestation, le vendredi qui suivait, soit le 22 février.

La situation dans les pays arabes

Le matin du 22 février, personne ne sentait les foules des dizaines de milliers d’Algériens. Tout était normal. Mais vers 11 heures, les premiers manifestants connus par les services de renseignement ont été interpellés à la place du 1er mai. « On nous a mis dans la cellule comme d’habitude, et les policiers nous ont même annoncé qu’on serait libérés le soir même » raconte, Abdelwakil Blam, un des manifestants interpellés.

Mais après la prière du vendredi, la police a de suite changé d’attitude avec les manifestants interpellés. « Nous étions dans les cellules et on ne savait pas ce qui se passait, jusqu’à ce que le commissaire en personne se dirigeait vers notre cellule en courant » raconte Blam. « Sortez, sortez, aidez-nous à organiser tout ce monde, on ne sait plus quoi faire nous suppliait-il« .

Le 24 février qui a suivi, soit le dimanche, le mouvement Mouwatana a lui aussi a appelé à une manifestation à Alger. Zoubida Assoul et Sofiane Djilali soutenus par beaucoup de militants ont réussi à tenir la manifestation malgré les arrestations massives.

Les partisans d’Abdelaziz Bouteflika, ont essayé par tous les moyens de « raisonner le peuple » , tantôt en évoquant la situation dans les pays arabes. À l’époque les hommes de Bouteflika vantaient les mérites du président, et ce qui pouvait en devenir du pays si celui-ci démissionne.

Bouteflika renonce à son  cinquième mandat.

Le 11 mars, le Hirak a commencé à porter ses fruits. Après deux semaines de pression populaire, Abdelaziz Bouteflika a été contraint à renoncer à son cinquième mandat,  «Il n’y aura pas de cinquième mandat et il n’en a jamais été question pour moi, mon état de santé et mon âge ne m’assignant comme ultime devoir envers le peuple algérien que la contribution à l’assise des fondations d’une nouvelle République » a-t-on rapporté dans une lettre attribuée à Abdelaziz Bouteflika le 11 mars 2019, soit deux semaine après une hospitalisation à l’hôpital de Genève.

« Yetnahaw GAA3 »

Ce soir-là, quand Abdelaziz Bouteflika avait renoncé à son cinquième mandat, plusieurs algériens ont investi les rues pour célébrer la première victoire du mouvement populaire, mais les manifestants ont déjoué le piège du « cadeau poisoné ». « Les hirakistes » ont exprimé par la même occasion leur détermination à poursuivre leur combat jusqu’au changement radicale du système.

Crédit photo : SOFIANE BAKOURI | Le slogan devenu symbole du Hirak, « Yetnehaw Gaa »

Cette nuit marque le premier recul de Bouteflika, mais aussi, la naissance d’un slogan devenu par la suite, symbole du Hirak : « Yatnahaw Gaa3 » (ils vont tous partir !). C’est lorsque le militant Sofiane Bakir Turki, 33 ans, a interrompu le direct d’une journaliste de la chaine Sky News Arabia, qui disait que « les algériens ne sont pas convaincus de ce changement, Yetnahaw gaa3 » « qu’ils partent tous », a-t-il crié face à la caméra.

Démission d’Abdelaziz Bouteflika  

Un mois après le début de la mobilisation populaire, feu Ahmed Gaid Salah, ancien Chef d’état-major, a appelé à l’application de l’article 102 de la constitution algérienne. C’était la première fois qu’il s’opposait publiquement au président qui l’a pourtant désigné à la tête de l’armée algérienne. Le 02 avril qui suivait, Abdelaziz Bouteflika a présenté sa démission au conseil constitutionnel répondant à une volonté populaire qui se faisait entendre depuis le 22 février de l’an 2019.

Crédit illustration : Saad | Illustration de Gaid Salah qui lache Bouteflika

Après la démission de Bouteflika, c’est le président du Conseil de la nation, Abdelakder Bensalah qui était appelé à assurer l’intérim du chef de l’Etat. Celui-ci avait pour mission d’organiser une élection présidentielle dans un délai de trois mois.  quelques jours plus tard, le corps électoral a été convoqué pour le 04 juillet 2019.

Cette élection boycottée même par les partis du pouvoir était un vrai fiasco pour Bensalah et Gaid Salah. Même les magistrats avaient annoncé qu’ils ne vont pas participer à l’organisation de cette élection présidentielle rejetée par le peuple.

Les deux généraux et anciens patrons des services de renseignement (Ex-DRS), Athmane Taratag, dit Bachir, et Mohamed Mediène, dit Toufik, ainsi que le frère cadet de l’ex-chef de l’Etat, Saïd Bouteflika, sont placés, le 05 mai, en détention provisoire par le tribunal militaire de Blida.

Ils étaient poursuivis sur la base de l’article 284 du code militaire et les articles 77 et 78 du code des procédures pénales pour les chefs d’accusations « conspiration contre l’autorité de l’Etat » et « atteinte à l’autorité de l’armée».

Personne ne s’attendait! Deux mois auparavant, personne n’a pu imaginer que Said Bouteflika, le frère « puissant » de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika sera mis en prison avec les deux chefs de l’ex DRS, Mohamed Mediene dit Toufik ainsi que Bachir Tartag.

Même le secrétaire générale du Parti des Travailleurs (PT), Louiza Hanoune a payé les frais cette fois-ci. Quelques semaines auparavant, Gaid Salah a évoqué une « réunion secrète » entre elle, Toufik, Tartag et Said Bouteflika chez l’ancien président Liamine Zerouale. Gaid Salah a qualifié cette rencontre à l’époque de « tentative de complot » contre l’armée nationale. C’est Suite à ça que Louiza Hanoune a été placée en détention par le tribunal militaire même si elle bénéficiait d’immunité parlementaire au moment des faits.

Emblème Amaigh

Alors que le mouvement populaire se poursuivait sans faille, les tenants du pouvoir cherchaient des arguments pour diviser le peuple resté uni malgré toutes les manoeuvres. Les services de sécurité instruits par « un ordre d’en haut » pour reprendre les termes d’un officier de police dans un des PV lu par les avocats lors d’un procès, des militants du mouvement populaire porteurs d’emblèmes amazighs ainsi que les porteurs de pancartes hostiles au pouvoir ont été arrêtés. D’habitude, ils sont relâchés le soir même, mais cette fois-ci, surprise !

Les services de police ont fait savoir aux avocats le soir même que les militants seraient présentés devant le procureur le dimanche qui suit, sans avancer aucun autre argument.

Arrestation de manifestants qui portent le drapeau Amazigh à Alger.
© INTERLIGNES | Arrestation de manifestants qui portent le drapeau Amazigh à Alger.

Les avocats qui se sont engagé dans une véritable guerre judiciaires contre « l’arbitraire » ont découvert le dimanche lors de la présentation des militants, que ces derniers sont poursuivis pour « atteinte à l’unité nationale » ,« Atteinte au moral de l’armée » et « incitation à attroupement non armée ».

L’affaire ne s’est pas arrêtée-là. Les arrestations se multipliaient lors des manifestations et parfois les militants sont même arrêtés chez eux. C’est le cas de l’ancien moudjahid Lakhder Bouregaa, l’opposant Karim Tabbou emprisonné jusqu’à ce jour à la prison de Koléa, et récemment le journaliste Khaled Drareni, arrêté alors qu’il exerçait son métier et placé sous mandat de dépôt à la prison de koléa.  

Condanation d’anciens hauts-dirigeants et hommes d’affaires proches du système

Une autre revendication du peuple, en plus de la démission de Bouteflika, a été réalisée.   Pour la première fois dans l’histoire de l’Algérie des anciens hauts-dirigeants ont été jugés pour des faits relatifs à la corruption. Même Said Bouteflika, frère du président déchu et son conseiller, jusqu’au là intouchable, a été mis derrière les barreaux. Poursuivis par le tribunal militaire de Blida pour « atteinte à l’autorité de l’armée» et « complot contre l’autorité de l’Etat » Said Bouteflika et les deux anciens patrons des services de renseignements algériens, Mohamed Mediène dit Toufik et Athmane Tartag ont été condamnés à quinze (15) ans de prison ferme. Malgré cela, les dirigeants n’arrivaient toujours pas à gagner la confiance du peuple algérien, pourquoi ?

L’élection du 12 décembre

L’ex chef de l’Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, a convoqué le 15 septembre 2019  le corps électoral pour l’élection présidentielle pour le 12 décembre 2019. En vrai, feu Gaid Salah a déjà annoncé cette date avant lui.  A l’image des deux élections présidentielles précédentes, le scrutin du 12 décembre a été aussi contesté plus que jamais.

Pour le peuple les conditions nécessaires pour aboutir à une élection propre et transparente n’étaient pas réunies. Des centaines de militants se trouvaient encore en prison et rien n’a changé au sommet de l’état! Malgré les annonces de Karim Younes nommé à la tête du panel du dialogue, les mesures d’apaisement annoncées n’étaient pas appliquées!

Les cinq candidats qui se sont présentés au scrutin à savoir Azzedine Mihoubi et Abdelkader Bengrina, Ali Benflis, Abdelmadjid Tebboune et Abdelaziz Belaïd étaient tous des ministres sous le règne de Bouteflika, donc pour le peuple, ce n’est rien d’autre qu’une mise en scène.

Le scrutin présidentiel s’est tenu sous une pression terrible. Les 12 et 13 février, des centaines de milliers de manifestants sont sortis pour dire non à ce scrutin qualifié du « scrutin de la honte ». En Kabylie, tous les bureaux de vote ont été fermés. À Tizi Ouzou par exemple, il y’avait 9 votants dont un bulletin nul! Cela exprime le ras -le-bol de toute la population, y compris les cadres de l’état.

Après ce coup de force, Abdelmadjid Tebboune a été annoncé président! l’élève qui dépassse son maitre! Cette annonce a provoqué la colère de la rue. Mais à peine 10 jours passés sur ce scrutin , le 23 décembre, Ahmed Gaid Salah décède! Personne ne s’attendait.

Anniversaire du Hirak

Le 22 février dernier, le Hirak a bouclé une année de mobilisation populaire. Il porte encore la même revendication principale en l’occurrence, le changement radical du système.  Le mouvement « suspendu momentanément » à cause du Covid-19 (Coronavirus), promet son retour dès la fin de cette pandémie qui fait plusieurs morts en Algérie à ce jour.

© INTERLIGNES | 1er anniversaire de la révolution du sourire
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